Le vent, le temps
Ce midi, sorti pour acheter un sandwich, je fus surpris
par des rafales telles que celles du plat pays sur la côte belge mais … sans la
mer, le sable et les mouettes.
Par la fenêtre de mon bureau je vois ses effets dans les
arbres. Ils s’agitent. Je l’entends par moments, espacé, souffler de ci de là
dans la maison, de hululements en hululements, de souffles en soupirs, de
résonnances aux silences.
Le vieux volet en bois défraichi tremble par à-coups et
fait retentir de petits claquements suite à ses sautes d’humeur, il vagabonde.
La fenêtre, entre ouverte, tremblote. Elle hésite entre ouverture et fermeture.
Elle se cherche.
Une moto retentit. Elle pétarade tellement que ce bruit
émane clairement du brouhaha continu du boulevard Saint-Michel tout à la fois
si proche et si lointain.
L’arbuste, poussant sauvage dans la haie, fait des
signes de désespérance avec ses feuilles bruissant à qui mieux mieux. Il
tourbillonne.
Le souffle se fait plus puissant, divers bruits
s’entrechoquent. Il mugit. Quelque part, une planche tombe. Les nuages noirs
s’alourdissent. Le soleil peine à les traverser. De temps en temps, une faible
lueur éclaircit le paysage pour mieux s’éteindre encore plus profondément l’instant
d’après.
Le jardin se
laisse bercer par la nature qui de l’automne a gardé les feuilles mortes, étalées de tout leur long sur une pelouse trop
haute, qui de l’hiver garde sa froidure, qui du printemps annonce sa floraison.
Le temps, ainsi, s’écoule indifférent à tout ce qui se passe. Le bouda en
pierre, appuyé sur la cabane en bois, reste zen.
La sonnette de l’école retentit, s’ensuit un plein
moment de calme avant la probable tempête des enfants rendus à leur liberté et
insouciance. Rien ne se passe si ce n’est un tram. Une sirène de police ou
d’ambulance se fraie à son tour un chemin jusqu’à mes oreilles. La porte de la
maison grince, un locataire sort. Elle grince à nouveau, il a dû oublier
quelque chose.
Des nuages plus blancs font leur apparition. Un coin de
ciel, d’un bleu de carte postale, émerge. Il s’est littéralement coupé en deux.
Le volet claque toujours. La porte, cette fois s’est ouverte pour livrer son
dernier passage. Les mugissements du vent se font plus aigus et constant.
Le temps passe, lentement, avec assurance qu’après lui
la vie continuera à s’égrainer.
Cette fois, un coup plus violent permet aux arbres de se
joindre à la party. Et de balancer de gauche à droite, à qui se montrera le
plus fier et le plus solide, défiant le souffle d’Eole jusqu’à lui arracher une
plainte de douleur et le faisant redoubler de fureur.
Une alarme de maison, au son si caractéristique, se fait
à son tour entendre. Elle languit à force de se répéter avant d’enfin s’interrompre
brusquement, redonnant la voix à la nature via le croassement d’un corbeau qui
passait par là.
Quelques taches de couleurs essayent de percer des tons
d’un gris souris auquel un chat sauvage ne daigne même pas jeter un regard.
J’allume une cigarette et la vie continue. Ainsi passe le vent, ainsi passe le
temps.
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